
Dix ans
(Sylvain Dubois)
Urbanisé le soleil urbanisée l’atmosphère
On canalise on restructure
On manque de tout on manque pas d’air
On crie à qui veut bien l’entendre
J’ai bien des raisons de me prendre
Au cou des souvenirs d’un temps
Où je voulais devenir grand
Sans attendre sans me languir
Sans voir que ce serai pas pire
Qu’on est con quand on n’a que dix ans
Lénifiées depuis longtemps
Toutes les révoltes prépubères
Tout le monde s’aime tout le monde chante
D’une même voix l’amour
Du prochain du malheureux
De l’affamé du myopathe
Main dans la main, fraternels
Au gré du vol des hirondelles
Nous cueillerons les fleurs sociales
Les roses rouges écarlates
Qu’on est con quand on n’a que dix ans
Qu’on est con quand on n’a que l’amour
Et l’enfance qui s’efface
L’indolence et l’espoir du beau jour
Et l’enfance qui s’efface
J’entends « c’était quand même mieux avant »
Une abeille faisait le printemps
On respectait on s’inclinait
On disait « vous » à nos parents
Pas de scandale dans la famille
Pas d’homosexualité
Pas d’attouchements sur les jeunes filles
Pas de violeurs à la télé
C’était le joli temps d’avant
Où les salauds étaient allemands
Qu’on est con quand on n’a plus dix ans
Dix ans qui n’en finissent pas
La fleur aux dents le cœur léger
Un sac de bille de la candeur
Quelques brimades à digérer
Du bonheur à mémoriser
Des blessures jamais refermées
Et demain qui nous terrorise
Et demain qui aura raison
De nous et de nos souvenirs
De nos dix ans de nos passions
Qu’on est con quand on n’a plus dix ans
Qu’on est con quand on n’a que l’amour
Et l’enfance qui s’efface
L’indolence et l’espoir du beau jour
Et l’enfance qui s’efface